J'ai fait mieux que Phileas Fogg ! Un tour du monde en 3 jours : je reviens de Norvège et de Suède, d'Israël, de Mexico, en passant par Versailles, Ramallah, un pti tour dans les Cévennes pour finir dans les Pyrénées. Incroyable et pourtant vrai, un festival d'images et de rencontres, d'autres vies, d'autres ailleurs, un certain regard sur le monde…
Je suis dans le train qui me ramène de Cannes.
Bizarre, tout a commencé aussi dans le train en Norvège, où j'ai rencontré Odd. Odd est conducteur de train, seul, à la veille de sa retraite. Sur les rails depuis des années, ce changement d'aiguillage au bout du tunnel sera un grand saut pour lui dans une nouvelle vie. Penser que tout est fini, alors que l'inconnu réserve encore de belles surprises, " O' Horten " de Bent Hamer, c'est un voyage assurément à découvrir. Cette première escale en Norvège m'a bien plu.
Film surprise pour la deuxième étape : retour à Paris. " C'est dur d'être aimé par des cons " : quand le cinéma rencontre la presse et témoigne de l'actualité. Un documentaire incisif sur le procès intenté à Charlie Hebdo pour la publication des caricatures de Mahomet. La caméra suit les différents protagonistes de cette histoire, témoignages, réactions, indignations s'enchaînent. Le vrai gagnant de ce procès reste la liberté d'expression.
Ma troisième étape cinématographique m'entraînera en Israël pour " Les 7 jours " de Ronit et Schlomi Elkabetz. Un cadrage serré pour un huis clos qui réunit ou désunit une famille après le décès d'un frère. Poids de la culture, des traditions, de la religion, révolte des femmes : violences des échanges en milieu non tempéré. 7 jours pour un espoir de paix ?
Décidément, ne perdons pas le nord et direction la Suède, à la poursuite du trésor perdu d'un légendaire viking. Mais attention ce n'est pas un film d'aventures et Jean Pierre Darroussin n'est pas Indiana Jones ! Passionné d'histoire, Jean Pierre, père divorcé, a élevé seul sa fille Jeanne. Chaque année un voyage les amène dans un pays différent. Pour les 17 ans de Jeanne, ce sera la Suède. Mais tout ne se passera pas comme prévu. Pour son premier film, Anna Novion a voulu saisir le regard de l'adolescence sur " Les grandes personnes ". Un premier film "prometteur " qui confirme que la Suède est un beau pays.
Retour à Paris, plus précisément à Versailles et pourtant c'est loin d'être Versailles, son château, son parc. C'est l'histoire d'Enzo, gamin, " abandonné " par sa mère et recueilli bien malgré lui par Damien, un marginal, vivant dans les bois. Damien, c'est Guillaume Depardieu, épatant, dans ce rôle d'écorché vif par la vie. Enzo et Damien vont se sauver l'un l'autre. Ce n'est pas un film triste, ce n'est pas un film de plus sur la pauvreté, le chômage, la marginalisation. C'est une rencontre, une simple rencontre sur un ton juste et vrai.
Changement de décor : Raymond Depardon a laissé s'échapper sa caméra à travers les Cévennes. Que la nature est belle lorsque les ombres rasantes d'un soleil couchant s'allongent sur les vallons. Mais derrière ces superbes paysages de campagne, se dévoile l'automne du monde paysan. De fermes en fermes, des témoignages de 15 à 88 ans sur la dure réalité des maux du monde rural. Un environnement qui façonne les hommes et les femmes, des silences qui en disent plus que les mots, des mots difficiles à trouver : " La vie moderne " est un superbe documenterre !
Direction Mexico pour un contrat d'un type particulier d'où on ne ressort pas indemne, c'est le moins qu'on puisse dire. " Los Bastardos " nous entraîne sur les traces de deux ados, armés contre la vie, d'un fusil comme simple repère. Un film qui a surpris tous les spectateurs par la soudaineté de la violence qui a traversé l'écran de cette salle cannoise. On n'oublie pas tout sous le soleil de Mexico.
Je repars du continent américain avec Soraya, direction Ramallah. Soraya, palestinienne née à Brooklyn souhaite, non, veut s'installer définitivement en Palestine. Je vais la suivre de Ramallah à Jaffa, à Jérusalem, la voir retrouver la maison de son grand père, rencontrer ce nouvel ami qui lui n'a jamais quitté Ramallah et souhaite s'exiler au Canada, la suivre dans ses démarches obstinées pour rester en Palestine. Je vais partager ce bout de chemin avec Soraya jusqu' à la mer. Goûter "le Sel de la mer ", merci à Anne Marie Jacir de nous l'offrir.
Et pour terminer mon tour du monde, j'embarque avec Jean Marie et Arnaud Larrieu pour un " Voyage dans les Pyrénées ". Pour ceux qui connaissent les frères Larrieu, petit avertissement :
Cela ressemble un peu à "La brèche de Roland ".
Cela ressemble un peu à " Un homme, un vrai "
Cela ressemble un peu " Peindre ou faire l'amour "
Mais , c'est encore plus déjanté et loufoque et comme on le signale à la fin d'un générique : toute ressemblance avec des personnes ou des situations ayant existé, serait purement fortuite.
Nota bene : nos Pyrénées sont super
De ce côté là, aucun risque. Impossible de vous raconter les aventures hilarantes de Jean Pierre Darroussin et Sabine Azema, de l'ours, des moines, des journalistes, de l'indien, vous me prendriez pour une folle.
Nota bene : nos Pyrénées sont superbes !
Voilà quelques impressions de mon premier séjour à Cannes. Un séjour riche en découvertes, sans strass ni paillettes. Point de talons aiguilles mais de bonnes chaussures de marche pour voyager dès 8h du matin de salles en salles jusqu'à minuit passé. Côté scène de vies sur la croisette, à l'ombre des palmiers, témoins silencieux de cette frénésie suscitée par la célébrité, c'est assez étonnant et stupéfiant de voir tous ces badauds en attente du passage d'une star. Il y a encore beaucoup à faire pour convaincre ce public de venir dans nos salles découvrir des films sans Georges Clooney ni Brad Pitt, ni Angelina Jolie. Découvrir en fait toute la diversité du cinéma.
Une conférence sur le thème " comment faire vivre des œuvres, tout en faisant vivre des salles, aujourd'hui et demain " a permis à tous les " exploitants " de mesurer à quel point le combat est loin d'être terminé pour que le cinéma ne devienne pas une espèce en voie de disparition.
Martine
Martine a très bien décrit le climat très particulier dans lequel baigne le festivalier cannois comme exploitant de salle ou appartenant à un autre métier du cinéma permettant d’obtenir une accréditation - sésame indispensable pour espérer assister aux projections des sections parallèles que sont :
- La Quinzaine des réalisateurs,
- La Semaine de la critique,
- Un Certain Regard,
Moteur !
- * se lever en général avec l’aurore (car tous n’habitent pas en face de La Croisette…) pour assister à la première projection de 8h30.
- * sortir (malgré la honte qui l’accable mais il jure qu’il ne le fait jamais en dehors du festival) avant la fin du générique,
- suivre le troupeau de ses congénères qui a la même préoccupation que lui : arriver au plus vite au stand des exploitants au sous-sol du Palais, faire la queue pour accéder à l’ordinateur, sélectionner les horaires des films du lendemain - s’ils sont accessibles - et aller retirer au même stand les invitations pour ces projections.
- * se précipiter pour le deuxième film de la matinée, en principe autour de 11h, passer les divers contrôles, s’asseoir et, avant que la séance ne commence, choisir les trois autres films de la journée sachant qu’il faut faire la queue au minimum une heure avant d’espérer entrer dans la salle et donc jongler avec les durées des films, les trajets entre les diverses salles de projection (plus de 500 m séparent la salle du Miramar de la salle Debussy).
- * apprécier le deuxième film, surtout si c’est le long métrage d’animation Kung Fu Panda de Mark Osborne et John Stevenson, un bijou formel à la gloire du héros improbable.
- * revenir dare-dare au stand si on n’a pas obtenu le matin les invitations pour le lendemain.
- * se sustenter selon les disponibilités (mais est-ce vraiment nécessaire ?...)
- * voir les trois films choisis pour l’après-midi et la soirée après être passé par les diverses contraintes indiquées ci-dessus.
- * regagner ses pénates, s’écrouler sur son lit
Donc pour une journée de 18 heures d’activité, compter une moyenne de 10 heures pour 5 films, 6 à 7 heures pour les queues et les trajets, le bilan est évidemment positif à condition de ne rester que 5 ou 6 jours car, à ce rythme, même les plus accros finissent par piquer un petit somme (autorisé voire recommandé pendant Le Voyage aux Pyrénées des frères Larrieu ou pendant le deuxième chapitre de Tokyo délicatement intitulé Merde massacré de concert par Léos Carax et Denis Lavant).
Et pour continuer la sélection de Martine, si vous trouvez votre vie coincée, étriquée, sans perspective réjouissante, allez voir
* Leonera de Pablo Trapero,
* Les Trois Singes de Nuri Bilge Ceylan,
* Linha de Passe de Walter Salles,et vous la trouverez sans doute douce, sereine, privilégiée.
* Si, comme Hugo, vous pensez que : « Ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent. » réconfortez-vous auprès de Hunger de Steve Mac Queen qui retrace la grève de la faim des Irlandais dans les prisons anglaises de Madame Thatcher.
* Enfin si vous détestez votre famille sans jamais avoir osé le lui dire, allez chercher l’inspiration dans Le Conte de Noël d’Arnaud Desplechin, c’est un vrai régal de causticité qui nous rappelle que depuis la mythologie parents et enfants se dévorent allègrement.
* Rien de nouveau sous le soleil donc mais c’est réalisé avec brio et culot, du pur plaisir on vous dit et en plus il sortira bientôt dans votre salle préférée…
Moi aussi j’ai repris le train, suis redescendue sur terre jusqu’à la prochaine séance au Mermoz où j’espère vous retrouver nombreux pour que « Vive… (vous connaissez la suite) »
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